Démasquer le Fantôme parisien de l’Opéra

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Et si je vous disais qu’il y a un lac sous l’Opéra de Paris, comme dans Le Fantôme de l’Opéra ? En bas, en bas, au fond de l’Opéra Garnier, dans une pièce miteuse avec un trou de forme carrée au milieu, je l’ai trouvé. Au repos dans le trou se trouvait une échelle qui semblait descendre nulle part.  » C’est quoi ça ? » J’ai demandé. « Cela, répondit mon guide avec un scintillement dans les yeux, c’est le lac. »

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(c)20 minutes

Comme dans LE lac du Fantôme de l’Opéra?

Je ne le savais pas quand ma tournée a commencé, mais la célèbre fable était située là où je me tenais. En glissant à travers les escaliers tentaculaires et les portes cachées de mon monument parisien préféré de tous les temps, il est devenu clair que le fantôme était bien plus qu’un conte de fées

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Notre guide a souligné le lustre même qui, dans l’histoire, tombe dans le public et nous conduit dans le numéro de la loge 5, la cachette privée du balcon du fantôme. L’endroit était tellement criblé de restes du fantôme que j’avais le sentiment qu’un peu de recherche allait réserver des surprises intéressantes.

Je n’avais aucune idée des révélations dans lesquelles j’étais in

escalier d'inauguration de l'opéra

Vous voyez, Le Fantôme de l’Opéra a été écrit par Gaston Leroux, journaliste et critique d’opéra français. Initialement publiée en plusieurs fois pour le journal Le Gaulois en 1909, l’histoire commence :  » Le Fantôme de l’Opéra a bel et bien existé. »

Escaliers

(c)Voyages européens

Le roman est saturé de personnes qui ont vraiment vécu, d’événements qui se sont réellement produits et de lieux que vous pouvez encore visiter aujourd’hui. Peu sont conscients du fait derrière la fiction; le livre n’est même pas considéré comme l’une des grandes œuvres de Leroux en France.

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J’ai donc décidé de prendre contact avec Mireille Ribière, la femme qui a recherché et re-traduit chaque recoin de la légende pour Penguin Classics, estimant que les autres versions ne rendaient pas justice à la relation de l’auteur avec l’Opéra. Elle a confirmé que les descriptions de Leroux du Palais Garnier et de ce qui s’est passé entre ses murs sont si détaillées et précises qu’il n’est pas étonnant que les gens se demandent encore si le fantôme était réel un siècle plus tard.

C’était ainsi ?

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Le Fantôme et Christine du film muet de 1926.

Indice no 1: Le lac

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Charles Garnier, architecte de l’Opéra éponyme, a rencontré un léger problème en creusant ses fondations. Ils avaient frappé un bras de la Seine caché sous terre et peu importe à quel point ils essayaient de pomper l’eau, elle continuait à se précipiter. Plutôt que de déplacer entièrement l’emplacement, Garnier a ajusté ses courants d’air pour contrôler l’eau dans les citernes, créant une sorte de « lac artificiel. »

(c) Emmanuel Donfut/(c)Plongeur.com

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Bien que cela ne ressemble en rien au célèbre lagon romantique de la comédie musicale, le personnel de l’Opéra aime nourrir les poissons résidents et les Pompiers de Paris y plongent de temps en temps.

Indice no 2 : Le Lustre qui tombe

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« Le lustre s’était écrasé sur la tête d’une pauvre femme qui était venue à l’opéra ce soir-là pour la toute première fois de sa vie, et l’avait tuée sur le coup. Elle était la concierge… »

– Gaston Leroux, Le fantôme de l’Opéra

Dans le numéro du 21 mai 1896 du Matin, un journal où Gaston Leroux était au clair de lune en tant que reporter principal de la salle d’audience, un titre lisait:  » Cinq cents kilos sur la tête d’un concierge ! »

En réalité, l’un des contrepoids du lustre pesant moins de dix kilos est tombé dans le public — mais a tué une femme. C’était Madame Chomette, concierge.

titres de lustre

(c)Critiques bestiales fantasmatiques

Effrayé encore? Il y a plus

Indice no 3: Un architecte qui a vécu sous l’Opéra avec le même nom que le Fantôme?

Opéra en construction vers 1870

Au cours de mes recherches, j’ai été mise en contact avec une professeure de littérature du nom d’Isabelle Casta, qui a beaucoup étudié Gaston Leroux et son roman. Selon Casta, Monsieur Leroux aurait entendu une étrange rumeur lors d’une visite à l’Opéra en 1908 selon laquelle un des architectes de Garnier, nommé Eric, aurait demandé à vivre sous l’incroyable structure … et n’aurait pas été revu depuis.

Opera construction rue Auber

Ce n’est pas un hasard si le fantôme de Leroux est un homme nommé « Erik » qui était un entrepreneur pour Garnier.

« Mais lorsqu’il se retrouva au sous-sol de la vaste salle de spectacle, son penchant artistique et illusionniste prit une fois de plus le dessus he il rêvait de se créer une retraite secrète, où il pourrait cacher à jamais son apparence monstrueuse au monde. »

– Gaston Leroux, Le fantôme de l’Opéra

Indice No 4: La Vraie Christine

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 » Pourtant rien comparé à la puissance surnaturelle de son chant dans la scène carcérale et le trio final de Faust. »

– Gaston Leroux, Le Fantôme de l’Opéra

L’ingénue fictive de notre roman pourrait s’appeler Christine Daaé, mais elle ressemble certainement à une soprano réelle Christine Nilsson, célèbre pour ses performances dans les opéras Hamlet et Faust.

262x350x10086802.jpg.vitesse des pages.IC.FVwkTu94H2Nielsson et Daaé ont beaucoup en commun: tous deux étaient suédois avec des cheveux blonds et des yeux bleus. Toutes deux étaient les filles de pauvres hommes, forcées de quitter leurs maisons à un jeune âge et finalement accueillies par un personnage nommé Valerius à Göteborg. Plus important encore, les deux se sont finalement retrouvés à Paris — bien que Nilsson n’ait jamais chanté à l’Opéra Garnier, annulant mystérieusement sa représentation avant l’inauguration de l’Opéra à la dernière minute.

Indice No 5: Les Enregistrements phonographiques enterrés

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Capturés sur cette photographie prise la veille de Noël 1907, vingt-quatre disques phonographiques des plus grands chanteurs d’opéra de l’époque ont été scellés dans des voûtes cachées profondément sous l’opéra de Paris. Ils sont restés non ouverts pendant cent ans.

« Certains d’entre vous se souviendront peut-être que récemment, des ouvriers, creusant dans les voûtes de l’Opéra où devaient être enterrés des enregistrements phonographiques des performances des chanteurs, sont tombés sur un cadavre; J’ai eu la preuve immédiate que c’était le corps du Fantôme de l’Opéra. »

– Gaston Leroux, le Fantôme de l’Opéra

Oubliée sous terre, la capsule temporelle a été découverte en 1989 par des ouvriers réparant le système de ventilation de l’Opéra et a finalement été ouverte en 2008. Cependant, aucune preuve réelle n’a été trouvée d’un corps exhumé lors de l’enterrement des archives tel que décrit dans le roman de Leroux.

(Néanmoins, vous pouvez acheter ce qui aurait pu être la véritable bande originale du Fantôme de l’Opéra ici).

(c)Bibliothèque Nationale de France

Indice n°6 : Cadavres de la Commune

Le livre commence par le narrateur (qui signe son nom G.L., comme Gaston Leroux) arguant que le corps retrouvé lors de l’inhumation des notices phonographiques a été mal identifié comme une  » victime de la Commune » et est, en fait, celui du fantôme. Des traces de cette  » Commune  » apparaissent partout dans le livre… mais à quoi fait-elle référence ?

Commune de Paris

La Commune fut un gouvernement utopique révolutionnaire qui s’empara de Paris pendant deux mois en 1871. Dans le roman, la Commune utilisait l’Opéra pour tout, du logement de son donjon au sous-sol au lancement de ballons depuis le toit. Il est vrai que pendant sa construction, l’Opéra a servi d’abri et de dépôt de vivres et de munitions pendant le siège prussien de Paris, qui s’est terminé deux mois avant le règne de la Commune. Plus étranges encore sont les cadavres qui ne cessaient de se présenter sur de nouveaux sites de développement urbain à l’époque où Leroux écrivait Le Fantôme de l’Opéra. Comme l’écrit Jann Matlock dans l’introduction de la traduction de Mireille,  » Il n’aurait pas été le moins surprenant for que l’Opéra protège le corps d’un de ces  » misérables  » massacrés between entre le 21 et le 28 mai 1871, alors qu’on estime à 25 000 le nombre de Parisiens tués. »

 » Tu crois que tu m’as suivi, grande motte, alors qu’en fait je t’ai suivi ; et tu ne peux rien me cacher. Le passage des Communards est à moi et à moi seul. »–

– (Erik le Fantôme)Gaston Leroux, Le Fantôme de l’Opéra

Indice no 7 : Passages inconnus dans l’Opéra ?

carte rue scribe

« foundtrouvé sur la rive du lac souterrain qui se trouve sous l’Opéra de Paris où il loge la rue Scribe. »

Gaston Leroux, Le fantôme de l’Opéra

Dans le coin supérieur droit du plan ci-dessus, vous pouvez voir où l’Opéra suit la rue Scribe. Le fantôme utilise une entrée trouvée dans cette rue pour accéder aux profondeurs de l’Opéra. Le système souterrain de Paris est si vaste et complexe qu’il est tout à fait possible qu’il existe des passages inconnus menant aux caves de l’Opéra depuis le monde extérieur. Jann Matlock affirme même que, « sûrement, dans un bâtiment qui avait 1 942 clés, il y avait des gens qui savaient comment descendre dans ces caves sans l’autorisation des autorités. Peut-être y avait-il même ceux qui ont fait de ces souterrains leur repaire habituel. »

Alors, l’Opéra Garnier était-il vraiment une fois hanté ?

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Mireille Ribière, dont la traduction du livre a été publiée par Penguin en 2009 et a encadré mes recherches pour cet article, m’a dit que le fantôme est très certainement inventé. J’ai protesté, citant que Leroux lui-même a insisté sur le fait que le fantôme était réel, le proclamant ouvertement après la sortie de la version cinématographique en 1926. L’homme l’a même juré sur son lit de mort!

Mireille m’a patiemment expliqué que Leroux était un personnage flamboyant, plus grand que nature, qui réagissait comme n’importe qui, tout Hollywood demandant si le fantôme était réel. « Si votre imagination a tellement réussi que les gens posent la question, vous n’allez pas détruire l’illusion. Si les gens voulaient croire qu’il avait existé, il n’allait pas les décevoir. C’est comme ça que je le vois « , a résolu Mireille dans notre dernier échange. « Mais cela dit, peut-être y croyait-il vraiment. »

Pour Mireille et d’autres chercheurs, Leroux était un journaliste révolutionnaire et un maître du roman policier qui tissait les faits et la fiction de manière si complexe qu’un fantôme devenait tangible.

Je sais que Mireille a probablement raison, mais quand on descend dans le labyrinthe sans fin de l’Opéra souterrain, tout semble possible.

Le fantôme de l’Opéra est là, du moins dans mon esprit.

Opéra photo vers 1900

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* Sauf indication contraire, toutes les citations et informations factuelles proviennent de la traduction par Mireille Ribière du Fantôme de l’Opéra de Gaston Leroux pour Penguin Classics (disponible sur Amazon).

À propos de ce contributeur :

rozena Rozena Crossman a déménagé à Paris sur un coup de tête en juillet 2011. Aventurière professionnelle, elle améliore sans relâche sa linguistique en anglais et en français à la Graduate School of Life.

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